Qui est réellement d'extrême droite en France ?


1) Les racines de l'extrême droite en France

La monarchie est abolie en 1789 suite à la Révolution française, au profit d'une monarchie constitutionnelle qui proclamera les Droits de l'Homme et du Citoyen. Ce sont les premières planches de bois au système démocratique. La République sera instaurée 3 ans plus tard en 1792, qui ne fera pas l'unanimité puisque qu'une droite anti-républicaine et anti-démocratique s'oppose à celle-ci. Droite composée entre autres des philosophes Louis de Bonald, Joseph de Maistre, et Antoine de Rivarol. Pour ce mouvement, être roi signifie avoir été choisi par Dieu. La monarchie de droit divine est donc la seule manière légitime et respectable de gouverner, et ce depuis le baptême de Clovis. Sans la monarchie et le christianisme, il n'y aura tout simplement plus de France. C'est ainsi que les ultra-royalistes manifestèrent leur désir du retour de l'ancien régime. Lorsque Louis XVIII devint roi en 1814, la majorité de la première législature de la Chambre des députés (nommée aussi "Chambre introuvable") était composée de royalistes hostiles à la République.
Ces royalistes qui se disaient même "plus royalistes que le roi", étaient hostiles aux concessions faites par Louis XVIII. En 1824 ils soutiennent Charles X, dont le sacre à Reims apaise les tensions en renouant avec la tradition. Cependant Charles X se plaça dans une position délicate quand, le 25 juillet 1830, il signa un décret portant atteinte à la liberté de la presse (les 4 Ordonnances) et déclenche la révolution de juillet 1830. La fidélité et la nostalgie des romantiques (Chateaubriand) pour l'ordre ancien idéalisé attirent la convoitise des royalistes. Par loyauté, ils refusent en 1830 de reconnaître l'usurpateur Louis-Philippe, qui accepte de devenir roi des barricades, fils de Philippe-Egalette, duc d'Orléans, qui a voté la mort de Louis XVI.
Ce mouvement inspira la droite extrême du XIXe et XXe siècles, qui se manifesta en 1993 place de la Concorde pour le bicentenaire de la mort de Louis XVI.

En 1880, la France est touchée par une crise économique et alimentaire (chômage de masse, baisse des prix agricoles, crise de l'artisanat, etc). C'est la Grande Dépression qui durera jusqu'à la fin du XIXe siècle. Le parlement est tenu pour responsable, ce qui entraîna une grande défiance envers celui-ci, déjà fragilisé par des scandales financiers. ( 1, 2, 3)
La droite nationaliste devint ainsi antiparlementaire, dénonçant les républicains au pouvoir "tous corrompus". Nacquit donc 2 partis populistes hostiles aux institutions républicaines :
-La Ligue des Patriotes.
-La Ligue de la Patrie française.

Au début du 20ème siècle, l'extrême droite c'était l'Action française, qui défendait une doctrine antidreyfusarde. Charles Maurras, un écrivain néoclassique, publie en 1900 son ouvrage Enquête sur la Monarchie.
Sans la restauration de la monarchie, rien ne pourrait être fait pour la France selon Maurras. Pour lui, la République était irréformable car noyée dans la corruption : La Réforme du XVIe siècle a brisé l'ordre hiérarchique imposé par l'Église au nom d'un esprit critique en désagrégation, et la philosophie des Lumières ainsi que la franc-maçonnerie sont à l'origine de la Révolution.
"La République est le régime des étrangers" : Elle est gouvernée par "quatre Etats alliés", ennemis de la nation : Protestants, francs-maçons, juifs apatrides et cosmopolites. Cette République ("la mendiante") doit être renversée par tous les moyens.
Elle doit être remplacée par une monarchie capétienne, antiparlementaire, traditionnelle, catholique et héréditaire.

En 1908 l'Action française publie sa propre revue de presse jusqu'en août 1944. Revue qui connaîtra un franc succès même au-delà de l'Action française. Ils recevront en 1911 la reconnaissance du duc d'Orléans, fils et successeur du comte de Paris et chef de la Maison de France.
L'Action française a contribué au développement du nationalisme social français. Corps militaire, l'Eglise, les victimes de la politique anticléricale de Camby dirigée par le pape Pie X depuis 1903, les conservateurs et les catholiques éminents, tous ont été influencés et attirés par l'Action française, qui souscrivent à leur traditionalisme et à leur corporatisme.
Ce nationalisme qui imprègne la société française dans son ensemble, et la dangerosité grandissante au niveau diplomatique, expliquent par exemple la loi des 3 ans votée en 1913.

Cependant les mouvements anti-républicains perdront en puissance et en influence après la première guerre mondiale (qui a renforcée la République). L'Action française perd le soutien de l'Eglise (accusé par celle-ci de faire de la démagogie), puis celui du nouveau Chef de la Maison de France, Jean, duc de Guise, successeur du duc d'Orléans. Elle fait notamment face à d'autres concurrents comme Les jeunesses patriotes, non royalistes mais favorables à un régime autoritaire et nationalistes.

Ces mouvements politiques de l'extrême droite se feront de plus en plus nombreux entre 1920 et 1940 : Le faisceau, La Solidarité française, Le Francisme, Les Croix-de-feu... Ces partis ont en communs :
-L'antiparlementarisme.
-Nationalisme antisémite et anticosmopolite.
-Anticommunisme.
-Culte du Chef.

Le 6 février 1934, plus de 100 000 personnes se rassemblent place de la Concorde pour défiler vers le Palais Bourbon. Les troupes étaient concentrées sur et à l'avant du pont. De violents affrontements ont éclaté entre gardes à cheval et manifestants. À l'insu du public, la fusillade éclate : 16 manifestants sont tués et des centaines blessés, ainsi que des centaines de policiers. Les émeutes de rue se sont poursuivies pendant des jours. Le régime lui-même semble menacé. Face à la menace, syndicats et partis de gauche organisent une riposte unie du 9 au 12 février : Premiers signes d'un retour de l'unité à gauche, annonçant le Front populaire…
Daladier démissionne de son poste de Président du Conseil pour éviter la guerre civile. Respecté des deux côtés, l'ancien Président de la République Gaston Doumergue, a formé un gouvernement d'union nationale visant à rétablir la paix dans le pays.

Le souvenir du 6 février sera vivace : Pour l'extrême droite, c'est le souvenir de ses "martyrs", victimes de la répression policière. Ce fut aussi une occasion manquée, alimentant la polémique entre Charles Maurras et le dirigeant des Croix-de-feu François de La Rocque, le premier accusant le second de "trahison" car il ne voulait pas ordonner à ses troupes d'attaquer le Palais Bourbon alors que les leurs arrivaient de la rive gauche de la Seine, sans avoir réussi à franchir les barrières du Pont de la Concorde.

Suite à cette tentative ratée de prendre le pouvoir, l'extrême droite perdra beaucoup en influence, trop divisée, et par manque de leader.
En 1940, c'est la "divine surprise" selon Charles Maurras, la IIIe République est abattue...
Emmanuel d'Astier de l'Action française fonde le mouvement de résistance "Libération", La Rocque est déportée en Allemagne. Les partis de gauche votent les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, et celui-ci s'entoure d'anciens Maurrassiens : Alibert, Ménétrel, Massis... Les dirigeants de la IIIe République (Blum, Daladier, Reynaud) considérés comme responsable de tous les malheurs sont poursuivis et emprisonnés.

A la fin de la guerre, l'extrême droite est sévèrement punie par "l'épuration" : Henriot est abattu par la Résistance, Robert Brasillach, Joseph Darnand, Marcel Bucard sont fusillés, Charles Maurras est condamné à la prison à perpétuité.
L'extrême droite perdit tout crédit suite à la libération du pays, et ce malgré la résistance à l'occupant allemand.




2) Caractéristiques de l'extrême droite

Le gouvernement qui correspond le plus aux caractéristiques de l'extrême droite dans l'histoire, est très certainement l'État espagnol dirigé par le général Franco de 1939 à 1975. Francisco Franco est souvent identifié de travers comme un fasciste parce qu'il a pris la tête d'une coalition de différentes factions de droite au début de la guerre civile espagnole après que leur premier chef ait été tué par un gouvernement républicain de gauche. Le côté nationaliste de la guerre civile était un mélange de "falangistes" (les fascistes), des royalistes qui voulaient restaurer la monarchie, et d'autres conservateurs qui ne se souciaient pas de savoir si l'Espagne était une république ou une monarchie.

Il a formé son régime avec l'aide de l'Italie fasciste et de l'Allemagne nazi ; et ne laissant pas l'Occident intervenir, il a gagné la guerre. Après sa victoire il a créé un régime ultra-conservateur que beaucoup qualifieraient de réactionnaire, et a passé les 36 années suivantes à imposer sa vision du monde à l'Espagne. Il a supprimé le multiculturalisme, a fortement soutenu l'Église catholique en tant que centre de la société espagnole, et a essayé de préserver les dernières possessions coloniales de l'Espagne aussi longtemps que possible.

Sa restauration de la monarchie en 1947 qui a pris effet après sa mort, est un autre exemple de son traditionalisme. Franco lui-même s'installa au Palazzo Pardo et s'attribua le grade de capitaine général, un titre habituellement réservé aux rois, et frappa des pièces avec ce support : "Francisco Franco, chef de l'Espagne par la grâce de Dieu". C'est ainsi que les anciens rois espagnols étaient appelés, seulement ils utilisaient le terme Rey (roi) au lieu de Caudillo (chef). Franco a régné en tant que monarque absolu et avait l'intention que Juan Carlos fasse de même après être devenu roi. Juan Carlos lui-même a décidé qu'il n'en voulait pas et a volontairement renoncé au pouvoir absolu en 1978.

Aujourd'hui de nombreux ultraconservateurs considèrent Francisco Franco comme un héros, même si certains ne l'admettront pas. Franco et son idéologie ont également été le modèle utilisé par Augusto Pinochet lors de sa prise de pouvoir au Chili en 1973. Les franquistes espagnols considèrent Pinochet comme son successeur spirituel.

La caractéristique principale de l’extrême droite est donc l’anti-parlemantarisme, suivi du totalitarisme et d’un ultra-conservatisme religieux (d’où le soutien que ceux-ci apportent aux monarchies). Il faudrait évidemment citer l’ultra-libéralisme que défendent de tels régimes.
En ce qui concerne le nationalisme, au sein des régimes d’extrême droite contrairement aux régimes fascistes, celui-ci est toujours plus civique qu’ethnique. Sans compter que c'est loin d'être le monopole de l'extrême droite, l'URSS de Staline ou Karl Marx étant également des nationalistes.




3) Qui est d'extrême droite aujourd'hui ?

Aujourd'hui la doctrine de l'Action française existe toujours, il y a des racistes et des antisémites dans le monde entier, donc même en France. Combien sont-ils ? J'en ai aucune idée mais nettement moins que dans des pays comme l'Autriche, la Pologne, l'Italie, le Japon, la Chine... Et ces gens étant comme tout le monde, certains ne votent plus, certains votent blanc ou nul, et certains votent. Quand un mouvement identitaire se présente, ils votent pour ce mouvement. Renaud Camus par exemple, aurait pu être considéré d'extrême droite puisque ses électeurs le sont très majoritairement. Il a présenté une liste et tous les candidats confondus de racisme, ayant eu des propos déplacés, ayant fait des saluts nazis ou quoi que ce soit d'illégal, ont été radiés du mouvement. Il y a ce que les médias appellent une dédiabolisation. Qu'est-ce donc ? L'envie de gagner donc de mentir ? Non. Les gens changent. Le FN de Jean-Marie Le Pen était par exemple homophobe, ce qui est un meilleur exemple que le racisme qui est plus complexe. Il y a encore des homophobes qui votent RN. Mais aujourd'hui le RN n'est pas du tout mais alors pas du tout homophobe. A Fréjus ou Béziers, les maires ont été réélus sans difficulté alors que la bienpensance les considère d'extrême droite. Parmi les électeurs on trouve des homosexuels, des juifs, des noirs et des arabes. Sont-ils fous ? Non, ils en ont juste marre. Marre de la délinquance, marre de la criminalité, marre de l'insécurité. S'il s'agissait de gens du voyage comme en Roumanie, ce parti viserait les manouches, les tziganes et les gitans. S'il n'y avait que des délinquants et criminels maliens, il viserait les maliens. Cependant les choses étant ce qu'elles sont, les incivilités, la criminalité et la délinquance sont de façon disproportionnée issues de l'immigration arabo-africaine. Le problème ne vient pas des chinois ou de leurs enfants, des polonais, et encore moins des juifs. Les gens sont à bout, même parmi les immigrés, donc votent pour des politiques qui ne sont pas d'extrême droite mais que les medias considèrent comme tel.

Il n'y a plus de partis politiques d'extrême droite en France depuis la fin de la 2nd guerre mondiale.
Prétendre que Marine Le Pen et Eric Zemmour sont d’extrême droite, c’est croire que l’histoire du monde commence à partir de l'an 2000. Zemmour est de droite populiste et républicaine. Peut-être bonapartiste si cela a encore un sens. Il se considère gaulliste et c'est le cas, il est le plus fidèle aux idées du général De Gaulle. Marine est une socialiste sur le plan économique, et conservatrice sur le plan social. Et bien sûr, les deux proposent le référendum dans leur programme. Difficile donc de les qualifier d'anti-républicains, ou d'anti-démocratie... Si vous vous intéressez à la politique, comparez les anciens programmes du Parti communiste (Georges Marchais), du RPR (Jacques Chirac), et du Parti socialiste (François Mitterand). Prenez le temps de comprendre les programmes actuels des partis de "gauche" et de "droite". Vous devriez noter rapidement que les extrêmes sont marginaux. Ce qu'on appelle dorénavant "l'extrême droite" en France est davantage comparable aux socio-démocrates danois qu’à Franco... C'est souvent un procédé rhétorique en France. Quand une réalité dérange certains, ils la classent à l'extrême droite. D'autres variantes sont possibles : Ultra droite, droite radicale, fascisme, heures les plus sombres, bruit de bottes... On est dans le sophisme nuisible à la vie démocratique et à l'intelligence. C'est un fourre-tout. Pratique car pas besoin de réfléchir, on est dans le pavlovien. Les gilets jaunes nous emmerdent à bloquer les ronds-points ? Extrême droite ! Quand on sait que c'est un mouvement qui défend la démocratie directe c'est ridicule, étouffant, et bloqueur d'échanges. Résultat : Les gens ne font plus confiance à la politique et ne votent plus. Certaines personnes comme l'enfarineur de Mélenchon ne croient plus au débat et passent à des actions plus directes. Que font les médias pour dénoncer ce déni de démocratie ? Ils les classent à l'extrême droite... Un cercle vicieux très dangereux.

La gauche pense que si l'on n'est pas humaniste, on est d'extrême droite. Or l'humanisme c'est excuser systématiquement, pardonner, comprendre. Tu es rentré chez moi pour me voler ? C'est parce que tu as faim. Tu as frappé quelqu'un pour lui voler son portable ? Tu es violent car la société est violente avec toi. Tu craches sur la France à longueur de journée alors que tu ne pourrais pas vivre dans ton pays d'origine qui est bien pire ? C'est parce que la France n'a pas fait sa repentance. Tu agresses une femme parce que sa jupe est trop courte ? C'est parce que tu n'as pas la même échelle de valeurs. Tu fais brûler ton quartier ? C'est parce que c'est un ghetto où il ne fait pas bon vivre. Tu fais du trafic de drogue ? C'est parce que les barrières à l'emploi sont élevées à cause de ton origine et du fait que tu portes un prénom qui ne donne pas envie à un patron de t'employer.
Les populations blanches et asiatiques (plus minoritaires du côté de l'immigration arabo-africaine) qui sortent de ces ghettos ne sont pourtant ni criminels, ni délinquants. Donc cette frange de la population en a marre. La considérer d'extrême droite car elle veut pouvoir marcher sereinement dans la rue, c'est fort de café comme dirait ma grand-mère...

Si vous cherchez l’extrême droite, la vraie, vous la trouverez au bled.


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08 juin 2022




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