En cas de guerre avec la Russie, est-ce que la France aurait la moindre chance de gagner ?


Dans la situation actuelle ? Il est déjà très improbable que le conflit aille jusque là, la Russie sera entrée en guerre contre les Etats Unis bien avant. Tout comme il sera très improbable que l'OTAN reste de marbre, de même que nos voisins limitrophes. Ou alors il faudrait que la France coupe les ponts de manière extrêmement brutal. A minima le pays doit devenir un régime totalitaire gouverné par un tyran. Mais à ce rythme là c'est plutôt nos voisins directs qui nous attaqueraient.

Mais admettons que tout ce que j'écris se produise, le dialogue est définitivement rompue et on atteint le point de non-retour. Admettons qu'aucun pays ne réagisse par de l'armement nucléaire, mais uniquement via une guerre conventionnelle.



La Russie pourrait tenter une attaque simultanée par la mer et sur le sol.

-Sur la mer :
La posture russe sera très probablement de tenter un débarquement soutenu par la plus grosse opération aéroportée depuis la Normandie en 1944. Pourtant je vois ici une victoire française. Nos généraux chercheront absolument à verrouiller la méditerranée pour rabattre les russes sur l'Atlantique. L'aviation mènera une attaque éclair sur la base de Tartous en Syrie pour détruire la flotte russe qui s'y trouve, puis possible attaque des bases russes en mer noire. Cependant cette tactique est risquée. Autant je ne suis pas inquiet concernant la base en Syrie (la France grâce à la flotte qu'elle possède en méditerranée et aux bases aériennes sera sûrement capable de la raser de la carte sans difficulté), autant pour Sébastopol il faut craindre la réaction turque. Est-ce qu'elle demeure neutre dans le conflit et ferme le détroit du Bosphore pour tout le monde ? Est-ce qu'elle prend parti et l'ouvre ? C'est difficile à prévoir. Admettons qu'elle l'ouvre. Une attaque sur Sébastopol nous coûterait sûrement une défaite car les russes peuvent concentrer une force aérienne bien supérieure à la France dans cette zone. Au lieu de prendre le risque de perdre le Charles de Gaulle, le plus raisonnable serait d'installer un blocus sur le détroit de Bosphore pour empêcher tout passage de la flotte de la mer noire en méditerranée. Une ou deux Frégate multi-missions anti-aérienne, un sous-marin de classe Rubis voire le Suffren en plus, le tout bourré d'Aster 30 et d'exocet. La France peut donc se préparer à un débarquement naval sur la côte Atlantique (en admettant que l'Angleterre les laisse faire, ce qui serait déjà très étonnant). La flotte française est suffisemment armée et organisée pour contenir la flotte russe. Il y a donc fort à parier que pour détourner les troupes françaises des côtes, les russes coupleront en amont du débarquement une opération de parachutage à l'intérieur des terres, voire sur la capitale pour désorganiser la lutte.

Qui en ressortira vainqueur ? Tout dépendra de la capacité de la France à annihiler la tête de pont russe. Et des russes à maintenir un flux constant en troupes et en matériel, s'ils sécurisent cette tête de pont. Ce qui est très difficile à prédire.


-Sur le sol :
Les amateurs pensent que les guerres sont gagnées par la tactique. Les généraux savent que les guerres sont gagnées par la logistique et la capacité à choisir ses batailles. Napoléon a échoué dans sa campagne en Russie après avoir gagné la bataille de Moscou, car de Tolly a battu en retraite pendant des mois sans livrer une seule bataille et en laissant une terre en désolation derrière (stratégie de la "Terre brûlée"), épuisant ainsi l'armée française, et usant sa logistique au point où une victoire lors d'une bataille ne représentait plus rien.
La Guerre Franco-Prusse de 1870 était perdue d'avance par la France à cause de l'absence de support logistique pour ses troupes en expédition. Le front allemand en 1918 a été brisé non pas à cause d'une seule bataille, mais par l'épuisement de l'économie allemande et de l'armée par des attaques incessantes et supportées par un système logistique supérieur. La Blitzkrieg de 1941 a échoué dû l'absence des routes de l'URSS coupant ainsi les lignes logistiques, puis face aux partisans détruisant et re-détruisant les chemins de fer rendant impossible l'accès au pétrole.

La philosophie russe du matériel militaire est qu'il survit seulement quelques minutes en combat. Par conséquent il doit être peu cher et facile à réparer. Ce qui marchait bien à l'époque de l'URSS est son économie qui lui permettait de sortir quelques centaines de chars par jour une fois en état de guerre. Aujourd'hui ce n'est plus le cas. La fin de l'URSS a complètement détruit ses capacités productives.
Dans l'hypothèse où nos pays frontaliers laissent passer son armée (ça n'arrivera jamais mais passons), la solution pour faire face à une invasion reste la même que celle de l'Allemagne de l'Ouest durant la Guerre froide : Les laisser avancer environ 200–300 km sans résistance le temps de laisser le matériel s'user et les lignes logistiques s'étendre trop, puis contre-attaquer une fois, et remettre la frontière à environ 50 km de la frontière russe sans essayer de la franchir, et enfin laisser l'économie russe s’effondrer.
A aucun moment on n'aura besoin du matériel du pointe en grande quantité, ni des forces expéditionnaires américaines. Les quelques milliers de chars de bataille et de pièces d'artillerie mobile en opération au sein de l'UE suffiront plus qu'assez. Et du fait des satellites espions, une opération terrestre d'ampleur et par surprise est improbable.


Maintenant d'un point de vue logistique :
Suite aux menaces apparues à la télévision russe, quant à la vitesse et le délai pour que le missile hypersonique Sarmat RS-28 (surnommé Satan II) puisse détruire des villes comme Berlin, Paris ou Londres, voici quelques infos et comparaisons avec le missile balistique hypersonique M51-2 français. Le M51 est nettement plus petit que le Satan II (12m au lieu de 35m) mais il a cependant une vitesse de Mach 15 (le Sarmat est à environ 20 fois la vitesse du son, à Mach 20 donc), plusieurs ogives nucléaires (jusqu’à 10 têtes et il en est de même avec le Satan II) et une puissance équivalente à 1000 fois la bombe d'Hiroschima (6 à 10 têtes nucléaires de 110 kilotonnes soit 1100 kilotonnes au total). Pour le Sarmat c'est 50 mégatonnes maximum au total. Il est donc beaucoup plus puissant, sauf qu'à ce niveau, qu'une ville soit rasée par 1 mégatonne ou 50, elle sera rasée quand même puisque nos missiles ont au moins 1000 fois la puissance de la bombe d'Hiroschima, on imagine ce que cela peut faire sur n'importe quelle ville de la planète. Donc nous avons aussi de quoi raser la Russie si elle attaquait la France ou n'importe quel autre pays de l'UE.

Voyons maintenant plus en détail notre M51–2.
Type de missile : Missile mer-sol balistique stratégique.
Constructeur : Ariane group.
Déploiement : En service depuis le 27 septembre 2010.
Caractéristiques : Moteurs 3 étages à propergol composite à perchlorate d'ammonium, solide de 180t de poussée.
Masse au lancement : 54t
Longueur : 12m
Diamètre : 2,3m
Vitesse : Mach 15 (soit 15 fois la vitesse du son)
Portée : 9 000 km à 10 000 km (estimé car données secret défense)
Altitude de croisière : Apogée estimée à 1 200 km
Guidage : Inertiel recalé par visée stellaire
Précision : 200 m
Plateforme de lancement : Sous-marins nucléaires classe Triomphant (mais cela n'exclue pas d'autres supports de lancements qui peuvent rester secrets)

En conclusion : Nos missiles M51 sont installés à bord de nos sous-marins nucléaires et avec une portée de 9 à 10000 km, une vitesse de Mach 15 et leurs têtes multiples, ils sont également inarrêtables. Leur puissance est certes inférieure à celle de Satan II, mais elle est 1000 fois celle de la bombe d'Hiroshima et Nagasaki. Quant on sait que ces premières bombes ont rasées ces deux villes et tuées des centaines de milliers de personnes, on peut imaginer ce qu'une puissance 1000 fois supérieure peut faire ! Nos missiles peuvent aussi se déverser sur n'importe quel point du globe, et détruire un pays tel que la Russie dans un délai de quelques minutes ! Quand on sait tout cela, quel pays serait assez fou pour vouloir s'attaquer à nous ?



Conquérir la France présente donc pas mal de risques. En 2022, une invasion de la France par la Russie n'est plus à l'ordre du jour. L'armée russe n'est plus que l’ombre de ce qu'elle était du point de vue logistique durant le temps de l'URSS. La taille de l'armée n'est tout simplement plus suffisante pour des opérations d'expéditions de longue durée. Ce n'est pas le cas seulement pour l'armée de terre russe, mais également pour l'armée de l'air et la marine. L'armée de la France n’est pas très grande en nombre, mais ses soldats sont bien entrainés, elle est bien équipée, et de manière générale assez bien organisée. Tout ça bien sûr est conditionné au fait que les russes n'ont pas tiré une seule torpille nucléaire sur le pays, qui provoquerait une riposte nucléaire française, et une invasion de la Russie en retour par les pays de l'OTAN. Prenons pour poursuivre l'hypothèse que ces deux risques ne se réalisent pas, en faisant les conjectures suivantes :
-La riposte nucléaire implique que l'on dispose d'un chef d'Etat qui ait le cran d'annihiler (et surtout qui maintienne aux yeux de l'adversaire l'apparence d'être prêt à le faire) des millions de personnes. Avec une grande majorité d'innocents dans le lot. D'aucuns diront que l'on pourrait se concentrer sur les forces armées, c'était le principe des missiles tactiques (notamment Pluton), capables de vaporiser un régiment (1000 à 2000 hommes). Nous avons démantelé cette capacité.
-On sait qu'aujourd'hui la population et les politiques sont acquis à un certain nombre d'idées humanistes, en tout cas bien plus que quelques décennies en arrière.
-Les États-Unis se feront fort de combattre russes et chinois, mais malgré l'énormité de leur armée leurs moyens ne sont pas illimités. Aussi une crise économique forte, des dissensions diplomatiques, ou un engagement majeur en Extrême-Orient pourrait réduire leur capacité d'action en Europe. Et si les belligérants appartiennent à l'OTAN, une mesure trop extrême pourrait faire basculer un allié dans une autre faction, auquel cas ils éviteront de séparer par la force leurs petits camarades.
Pour toutes ces raisons, pour pouvoir donner une réplique qui ne soit :
-Ni nucléaire,
-Ni doctrinalement et matériellement inadaptée,
-Ni une reddition pure et simple,
La France doit réactiver sa capacité à faire la guerre conventionnelle à haute intensité.


31 mai 2022




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